dimanche 14 juillet 2013

Le Sphinx "est tout simplement un monstre engendré par la folle imagination d'un peuple heureux" (Samuel Sullivan "Sunset" Cox - XIXe s.)

Extraits de Orient sunbeams or From the Porte to the Pyramids, by way of Palestine, publié en 1882, Samuel Sullivan "Sunset" Cox (1824-1889).
Cet auteur était membre du Congrès américain et diplomate (il fut une année ambassadeur auprès de l'Empire ottoman).

Cliché G. Lékégian & Cie (1886)

“Much has been written as to this mystic god of the ancient cradle of civilization, the Sphinx which is the name for Egypt. I am puzzled to express my idea of it and its temple. We alight amid the sandy heaps, and look down into the rock-cut caverns, and up to the half-hid genius of the Unknown.
The Sphinx is sunk in the lime rock. It is a part of it. The tombs about it are lined with immense granite blocks, laid in perfect courses, and with joints as true and handsome as any modern masonry. These blocks came from the cataract, 800 miles above. They form an antique cemetery, covered by forty feet of sand. The temple is thirty feet beneath the level of the sand. From it. a roadway, paved with white flagstones, leads up to the pyramids. They seem to have been connected, religiously. The nose of the Sphinx is broken or worn off. It detracts from his dignity. It is a mistake to call the Sphinx
her. His head-dress is partly demolished. Once the head was crowned with the royal helmet of Egypt ; but his feet and form remain for solution. Let its Oedipus stand forth ! There is no satisfactory guess yet as to any of these gods of Egypt. Only one thing is surmised, that in the gods we see the men who made them. We read in their calm features aspirations after the other world Immortality !
The pyramids are resolvable into tombs, or, if you please, by a stretch of fancy, into astronomical edifices ; but this Sphinx has been from the earliest days as much of a dumb enigma as the protoplasm. An intelligent and metaphysical writer, who was here, regards the Sphinx as more wondrous than the pyramids, because so awful and lonely. He even finds comeliness in the thick lips of the Sphinx, and regards him as a forgotten mould of beauty. To my thinking he or it is simply a monster, begotten of the wild imagination of a sunny people, who, after running out of the animal creation for their deities, framed this miscreant. It is said to be an image of the Deity, because unchangeable, having the same will and intent forever ! But it has changed. It is not inexorable. It is dead rock, and subject to mutilation and wear like any other piece of limestone.
I have seen in Corsica forms almost as whimsical, bearing resemblance to birds, beasts, and creeping things, and to men and devils. The impression, however, which this Sphinx and its problem produce here, on this lonely, shifting edge of the unknown desert, is owing as much to its age as to its insolubility and monstrosity. I cannot connect, with it, except nebulously, the idea of Deity or of immortality. Nor can I feel the same sense of vague, nightmarish horror in contemplating its sister monuments.”

samedi 29 juin 2013

“L'art qui a conçu et modelé dans la montagne cette statue prodigieuse était un art complet” (Gaston Maspero - XIXe-XXe s.- à propos du Sphinx)

De Gaston Maspero (1846-1916), dans son Histoire ancienne des peuples de l'Orient classique :


“Le prolongement de la chaîne Libyque forme, entre le Fayoum et la pointe du Delta, un vaste plateau légèrement ondulé, qui court parallèlement au Nil sur une longueur de près de trente lieues. Le grand Sphinx Harmakhis en gardait l'extrémité septentrionale depuis le temps des Suivants d'Horus. Taillé en plein roc, au bord extrême de la montagne, on dirait qu'il hausse la tête pour être le premier à découvrir par-dessus la vallée Ie lever de son père le Soleil. Son corps effrité ne retient plus du lion que la coupe générale. Le bas de la coiffure est tombé et le cou semble trop faible pour supporter le poids du crâne.

Des mamelouks fanatiques lui ont mutilé le nez et la barbe à coups de canon ; la teinte rouge qui avivait les traits s'est effacée presque partout. Et pourtant, l'ensemble garde jusque dans sa détresse une expression souveraine de force et de dignité. Les yeux regardent au loin devant eux avec une intensité de pensée profonde, la bouche sourit encore, la face entière respire le calme et la puissance. L'art qui a conçu et modelé dans la montagne cette statue prodigieuse était un art complet, maître de lui-même, sûr de ses effets. Combien de siècles ne lui a-t-il pas fallu pour arriver à ce degré de maturité et de perfection !”

vendredi 28 juin 2013

“Un tribut de curiosité au fameux colosse taillé en forme de sphinx”, par Edme-François Jomard (XVIIIe-XIXe s.)

Extraits de la Description de l'Égypte ou Recueil des observations et des recherches qui ont été faites en Égypte pendant l'expédition de l'armée française (1829, tome V), éditée par Charles Louis Fleury Panckoucke.
Ce texte est d'Edme-François Jomard (1777-1862).



“Tous les voyageurs qui visitent les Pyramides vont payer un tribut de curiosité au fameux colosse taillé en forme de sphinx. Il est à environ 600 mètres (1800 pieds) à l'est de la deuxième pyramide, au milieu d'une plaine recouverte de sables, plus basse que le plateau. (1) On l'a certainement pris tout entier dans le roc, bien que la tête porte des traces de lits qui figurent assez bien des assises réglées.
Le Sphinx est comme à l'ordinaire un lion assis, portant la tête humaine, mais d'une proportion gigantesque ; c'est la plus grande des figures d'homme ou d'animal que les Égyptiens aient jamais sculptées. La coiffure est semblable à celle des colosses de Louqsor et des autres figures égyptiennes ; ce sont des sillons ou rayures, horizontales en avant, convergentes sur le derrière de la tête. Le corps n'a pas moins de 29 mètres de long (...), encore une partie de la croupe est-elle cachée sous les sables. La tête, depuis le menton jusqu'au sommet, a 8m55 (26 pieds), et, en défalquant l'épaisseur de la coiffure, environ 8m3. De là, en comparant cette figure avec les sphinx de même genre qui sont à Thèbes, on peut conclure que la distance du sol sur lequel posent les pieds du lion symbolique, jusqu'au dessus de la tête, autrement la hauteur du monument (sans parler du socle) doit être d'environ 24 mètres ou 74 pieds : du moins, l'accord qui existe entre le rapport de la tête à la longueur du corps, dans la figure de Thèbes, et celui qui existe dans la figure des pyramides, permet de faire la comparaison, et d'en déduire cette élévation.
Depuis les temps antiques, les sables ont recouvert le corps presqu'en entier : peut-être même ils cachent un socle sur lequel reposait la figure, comme dans tous les monuments de même sorte. Aujourd'hui, le dessus de la tête est à 42 pieds du sol, et le menton à 16 pieds ; un peu au-dessous de la naissance des épaules, tout est enfoui. La partie inférieure, ou le cou, est usée et elle semble même criblée de pores comme les rochers à Alexandrie, que ronge l'air de la mer, mais ce n'est qu'une apparence.
Il serait inutile ou plutôt presque impossible de décrire par le discours l'aspect du Sphinx des Pyramides ; renvoyer aux planches est le seul moyen d'en donner une idée un peu juste quoique bien faible encore : on y verra du moins la proportion de la stature humaine avec ce géant. Un homme debout sur la saillie du haut de l'oreille aurait de la peine à atteindre le dessus de la tête avec la main étendue. On s'élève au sommet de la figure et par derrière à l'aide d'une échelle de 25 pieds de hauteur ; là on trouve une ouverture. C'est celle d'un puits étroit où les curieux descendent ordinairement, mais il est en grande partie comblé ; au bout de quelques mètres on trouve le fond : l'on n'a pas découvert jusqu'où il pouvait conduire autrefois, si en effet il avait quelque profondeur, ce qui est fort douteux.
La face du Sphinx a été peinte d'une couleur rouge brun, qui subsiste encore ; c'est à peu près la teinte que les Égyptiens se sont donnée à eux-mêmes dans les représentations consacrées à la vie domestique ou aux scènes militaires. On en a conclu sans fondement que cette tête fournissait le type exact de la physionomie égyptienne, et cela sans s'embarrasser ni des sculptures, ni des peintures, ni des momies, qui cependant fournissent toutes sans équivoque le vrai caractère de la figure.
Je ne sais par quel esprit de système on a été jusqu'à conclure du Sphinx que les anciens Égyptiens étaient des nègres, c'est-à-dire des hommes noirs, à cheveux crépus et laineux, à front bas et en arrière, à nez épaté, etc. L'existence de ce dernier caractère a paru prouvée incontestablement aux auteurs de l'assertion, attendu que le nez du Sphinx a été brisé et presque enlevé, circonstance comme on voit fort concluante. Mais pourquoi le peintre égyptien, en faisant son propre portrait, ne l'a-t-il pas peint en noir, et pourquoi le sculpteur a-t-il laissé le front presque droit ? Loin de nous l'idée de rabaisser par cette observation les races de noirs ; mais quand on voit ceux-ci représentés par les Égyptiens eux-mêmes dans leurs peintures, de la manière la plus distincte, et qu'on examine avec attention les têtes de momies bien conservées, celles des belles statues égyptiennes, celles des peintures et des bas-reliefs des hypogées, des palais et des temples ; qu'enfin on les compare aux indigènes même de la haute Thébaïde, est-il possible de douter que les anciens Égyptiens aient appartenu à la race dite assez improprement caucasienne ? Ils avaient, à la vérité, les lèvres un peu bordées et les pommettes saillantes, mais cela ne change presque rien au type primitif.
Je ne crois pas nécessaire d'insister davantage sur ce sujet, que d'ailleurs j'ai traité avec plus de développement, dans la Description des hypogées de la ville de Thèbes. Le type égyptien consiste surtout dans le prolongement du trait du nez (trait si court au contraire chez les noirs de l'Afrique intérieure), dans son contour aquilin, et encore dans la direction commune du nez et du front selon un même plan légèrement incliné ; et c'est ce qui constitue sa principale différence avec le type grec, dans lequel la direction commune au front et au nez est presque perpendiculaire, tandis que chez les Égyptiens elle est inclinée de 76 à 78 degrés.
Je reviens au Sphinx, où cette partie du visage est trop défigurée pour qu'on puisse bien apprécier le caractère de la physionomie. Quelques-uns, mais à tort, en ont trouvé la figure difforme : loin de là on remarque un travail ferme et hardi dans l'exécution des yeux et des orbites, surtout dans celle de la bouche et de l'oreille. Cependant, augmenter jusqu'à plus de trente-six fois la grandeur des formes humaines a dû présenter au sculpteur une immense difficulté : on le sent aisément sans qu'il soit nécessaire d'insister sur cette observation.
Les Arabes ont surnommé cette figure Abou-lhoul, le père de la terreur, bizarre appellation, et qui eût étonné fort les auteurs de la statue, s'ils eussent pu prévoir qu'on la lui donnerait un jour (2) : peut-elle effrayer en effet qui que ce soit, si ce n'est les petits enfants ? En même temps, et par une sorte de contradiction, les Arabes la considéraient comme un puissant talisman, qui s'oppose à l'invasion des sables, et protège la vallée du Nil contre son plus redoutable ennemi : autre erreur bien plus grossière, dont ils ont reconnu eux-mêmes l'absurdité, en voyant les sables descendus à 500 mètres au-delà du Sphinx, et lui-même ayant presque tout son corps enseveli. Au reste, il tourne le dos et non la face aux sables qu'il était censé arrêter par une influence magique et irrésistible.
Cette face est tournée à l'est, mais non exactement ; l'axe du corps fait avec la ligne E-O, un angle d'environ 18° 30’, d'après le plan topographique. Peut-être (mais ce n'est qu'une hypothèse) les constructeurs de la pyramide ont-ils voulu diriger la figure vers l'orient d'été, c'est-à-dire vers le soleil levant, à l'époque du solstice.”

1 - Le menton du sphinx est à 25m82 au-dessous du pied du rocher de la grande pyramide ; il a été trouvé supérieur de 18m67 aux basses eaux du canal occidental, le 25 frimaire an VII (15 décembre 1798).

2 - Ce mot est tiré de l'ancien nom qui, selon Maqryzy el-Soyouty, était Belhyt, ou Belhout. M. Langlès l'interprète en qobte par oculus terribilis (Voyage de Nordcn, t.111, p. 342), mais M. de Sacy par oculus et cor, celui qui est sans déguisement ou qui a le cœur dans les yeux (trad. d'A'bd-el-latyf, p. 569).

jeudi 27 juin 2013

Un numéro spécial de la revue Kadath consacré au Grand Sphinx de Guizeh : n° 81, automne-hiver 1993 (l’hypothèse de Robert M. Schoch)


“Tout (ou presque) sur le Sphinx”, par Jacques Gossart

“L’âge du Sphinx : Vers une révision déchirante ?”, par Robert M. Schoch, College of Basic Studies, Université de Boston
“La plupart des égyptologues attribuent la réalisation du Sphinx à Chéphren, pharaon de l’Ancien Empire vers 2500 avant J.-C. En me fondant sur un ensemble de caractères essentiellement géologiques, j’ai émis l’hypothèse que le monument que nous connaissons aujourd’hui comme étant le Grand Sphinx a été construit par étapes (peut-être même n’était-ce pas un sphinx à l’origine). Il est possible que le corps de ce qui est devenu le
Sphinx ait été sculpté entre -7000 et -5000. Par la suite, il a été retravaillé, restauré, rénové, — plusieurs fois au cours des millénaires, y compris probablement pendant le règne de Chéphren. La croupe de l’animal notamment fut taillée beaucoup plus tard que l’ensemble du corps, et la tête a probablement été remodelée. Dans les pages qui suivent, j’explique comment je suis arrivé à envisager cette hypothèse. Je discuterai des diverses
preuves qui la confirment, ainsi que des différentes critiques dont elle a fait l’objet.” (Robert M. Schoch)
 . Les divers types d’érosion
 . Une construction en deux temps
 . De multiples campagnes de restauration
 . Études sismiques
 . Un emplacement prémédité
 . Pourquoi l’attribuer à Chéphren ?
 . Un contexte archéologique pour le Sphinx
 . Objections à l’hypothèse
 . Le Sphinx et le mouvement New Age


mercredi 26 juin 2013

“Le Sphinx est moins l'œuvre des hommes que l'œuvre de la nature” (Charles Ernest Beulé - XIXe s.)

Le texte qui suit, extrait du Bulletin des sociétés savantes, tome 1er, 1854, a pour auteur Charles Ernest Beulé (1826-1874). Ayant été élu membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres en 1860, cet archéologue et homme politique français devint secrétaire perpétuel de l'Académie des beaux-arts en 1862.
La description qu’il propose du “grand Sphinx” revêt surtout un caractère historique, mettant en relief notamment le rôle de Mariette dans les recherches et découvertes liées à ce “monument gigantesque”.

Illustration extraite de l'Album de voyages en Égypte, Grèce, Turquie, Algérie et Russie (1887-1890)
“J'ai exposé dans un précédent numéro du Bulletin la découverte du Sérapéum de Memphis. Je me suis attaché à bien mettre en évidence les recherches de M. Mariette, leur difficulté, leur but, leur succès, l'importance des résultats qu'elles ont obtenus ; il me reste à parler des fouilles que M. Mariette a entreprises autour du grand Sphinx.
Le Sphinx est une statue, ou, si l'on aime mieux, un monument gigantesque, situé à l'est de la deuxième pyramide de Gyzeh.
De tout temps, le Sphinx a attiré l'attention des voyageurs, non seulement par sa masse énorme, mais par les souvenirs que son image évoque dans les esprits. La pensée se reporte naturellement à la tradition grecque, qui, du reste, a passé en Égypte et s'y est maintenue ; le Sphinx semblait une énigme éternelle proposée à la postérité. On croyait jadis à une communication souterraine avec la deuxième pyramide qui se trouve à 1800 pieds en arrière du Sphinx. Enfin, Pline, dans un passage assez obscur, que je citerai plus bas, dit que le roi Armaïs avait été enseveli dans le Sphinx. Voilà pourquoi ce monument prend une importance singulière, pourquoi, de tout temps, il a été étudié, exploré ; je résume en quelques mots l'histoire de ces explorations.
Le Père Vansleb prétendit le premier avoir vu par un trou, dans le dos de l'animal, une chambre qui n'avait pu servir qu'à contenir un mort.
Le docteur Pockocke, à son tour, affirme qu'il y avait sur le dos du Sphinx un puits, qui descendait verticalement et aboutissait à des appartements souterrains.
Du temps de l'expédition française en Égypte, la Commission fit des fouilles, sous la direction du colonel Coutelle ; on mit au jour tout le flanc méridional du Sphinx. D'après la tradition conservée parmi les Arabes, au moment où les Français furent contraints par les événements de la guerre d'abandonner leur entreprise, ils venaient de découvrir une porte en granit sur laquelle étaient gravées des inscriptions.
En 1816, un capitaine de vaisseau marchand, nommé Caviglia, par une résolution digne d'un savant encore plus que d'un marin, attaqua le Sphinx. Il déblaya d'abord une partie de la face septentrionale, puis, désespérant du succès, il fouilla par devant, entre les pattes étendues de la statue. Là, il trouva une sorte de petit temple hypèthre, formé de trois grandes stèles qui se coupaient à angle droit. La façade était ouverte, précédée seulement d'une grille et de deux petits Sphinx. En continuant les fouilles, toujours en avant du Sphinx, Caviglia rencontra, à une distance d'à peu près vingt mètres, un escalier de construction grecque. Il devenait évident que, dès l'antiquité, le Sphinx était enseveli en partie sous les sables. Ceux qui voulaient visiter le petit temple n'avaient d'autre moyen d'y descendre que l'escalier. Les fouilles de Caviglia eurent encore pour résultat la découverte d'un certain nombre d'inscriptions grecques curieuses, parmi lesquelles le monde savant connaît l'inscription métrique, signée d'Arrien, et le décret par lequel l'empereur Néron ordonna la restauration du péribole du Sphinx. On sait quel parti M. Letronne a tiré de ces inscriptions. Caviglia en resta là, quoique le problème fût assurément loin d'être résolu. Le Sphinx était toujours une énigme.
En 1836, le colonel Vyse, armé de puissants instruments, voulut couper court aux discussions, en perçant le Sphinx d'outre en outre dans toutes ses parties solides. Mais les sondes se brisèrent, et il fallut renoncer encore à la solution du problème.
Au mois de novembre 1851, M. Cottrell, voyageur anglais, connu par la traduction de l'ouvrage de M. Bunsen sur l'Égypte, découvrit à Florence, dans le musée de Santa Catarina, au milieu des papiers de Caviglia que l'on y conserve, un plan inconnu du Sphinx. Ce plan indiquait derrière le Sphinx deux petites chambres ornées d'hiéroglyphes. A son retour en Angleterre, M. Cottrell communiqua sa découverte à M. Birch, le célèbre égyptologue ; M. Birch, à son tour, dans le Classical report of antiquities (mars 1852), fit part au monde savant de la découverte de son compatriote, en montrant de quelle importance serait la confirmation de ce document.
M. de Rougé, de l'Institut, eut à peine connaissance de l'article de M. Birch, qu'il en parla à M. le duc de Luynes. M. le duc de Luynes, qui saisit si généreusement toutes les occasions de servir la science, écrivit à M. Mariette, lui demandant s'il voulait, malgré tant d'essais inutiles, tenter aussi l'entreprise.
Au mois de septembre 1853, M. Mariette était en face du Sphinx. Naturellement, il fallait d'abord chercher les deux chambres dont il était question dans l'article de M. Birch. Mais en mesurant les distances et en comparant l'état des lieux avec les plans retrouvés dans les papiers de Caviglia, M. Mariette s'aperçut immédiatement que les deux chambres n'étaient autres que celles qui sont connues de tous les voyageurs ; d'habitude, en visitant les pyramides, ils y passent même la nuit. Quant aux légendes qui ornaient les façades de ces chambres, les Arabes furent unanimes pour déclarer qu'elles avaient été détachées et enlevées par Caviglia lui-même.
La mission se trouvait donc par le fait remplie, et le but que M. le duc de Luynes avait indiqué à M. Mariette était ainsi atteint. Résolu cependant à faire profiler l'archéologie des ressources qui avaient été mises à sa disposition, l'auteur des fouilles du Sérapéum s'attaqua au Sphinx tout entier.
Il avait accepté la mission de M. le duc de Luynes avec d'autant plus d'empressement que trois fois déjà il avait eu à s'occuper du grand Sphinx. La première fois, c'était pendant son séjour aux Pyramides, lorsqu'il avait étudié les monuments du désert en simple touriste ; la disposition des terrains et les lois même de l'atterrissement du sable lui avaient fait supposer l'existence d'un édifice considérable aux alentours du Sphinx, et plutôt du côté du sud que du côté du nord. La seconde fois, c'était à l'occasion d'une stèle hiéroglyphique découverte dans l'intérieur même de la tombe d'Apis, du Sérapéum. Cette stèle est curieuse à plus d'un titre. En effet, elle contient l'énumération des divers membres d'une famille qui, vers le temps de Darius Ier, habitait Memphis. Le personnage principal de cette famille était un fonctionnaire de l'ordre sacerdotal ; parmi ses titres nombreux, M. Mariette avait remarqué celui de prêtre attaché aux trois grandes Pyramides et au Sphinx (sous son nom d'Armachis). Cette donnée si particulière ramenait avec plus de force l'hypothèse d'un édifice attenant au Sphinx ; car, si les trois grandes pyramides ont chacune leur temple que tout le monde connaît, il devait en être de même du Sphinx, et on voit déjà comment les pyramides et le Sphinx ne sont que les mêmes parties d'un grand ensemble soumis à un seul administrateur.
La troisième circonstance qui avait appelé l'attention de M. Mariette sur le Sphinx était d'un ordre tout différent. Il résulte des observations de M. Biot que, si les grandes pyramides sont parfaitement orientées, il se produit, aux deux équinoxes, le phénomène suivant : le jour de l'équinoxe, le soleil se lève à l'extrémité d'une perpendiculaire qui part du milieu de la face orientale de la plus grande des trois pyramides, et au contraire, il se couche à l'extrémité d'une perpendiculaire abaissée sur la face occidentale. On devine l'utilité pratique de cette disposition du monument. Il suffisait, pour les Egyptiens, de se placer à l'angle nord-ouest et d'examiner le soleil levant. Le jour où le prolongement de la face à l'une des extrémités de laquelle l'observateur était placé allait couper le disque solaire par la moitié, ce jour-là c'était l'équinoxe ; de sorte que la pyramide, bien qu'étant dans le principe un monument funéraire, aurait pu dans la suite aider les Egyptiens à fixer le retour périodique de certains phénomènes célestes. Telle était l'hypothèse de M. Biot. M. Mariette, sur sa demande, était allé en chercher la confirmation au pied même de la pyramide, et ses observations réalisèrent les prévisions de l'illustre astronome. Mais en même temps il retrouvait le Sphinx ; l'énigme se présentait sous une nouvelle face. N'était-il pas possible que le Sphinx, lui aussi, entrât dans une combinaison astronomique ? Placé exactement en face de la seconde pyramide, ne pouvait-il à son tour servir de point de repère ? Ne pouvait-il, avec l'un des angles de la pyramide, déterminer la ligne droite qui marque l'un des deux solstices ? Tous ces souvenirs s'étaient présentés avec plus de vivacité à l'esprit de M. Mariette, quand M. le duc de Luynes lui offrit de fouiller le grand Sphinx.
Les deux chambres de Caviglia n'avaient aucun intérêt ; il fallait explorer le monument dans son entier et sur l'échelle la plus vaste. Confiant dans le témoignage de Pline, qui dit que le roi Armaïs (Amosis) y était enseveli, M. Mariette considéra d'abord le Sphinx comme une pyramide, c'est-à-dire comme un tombeau royal, et il chercha l'entrée du côté du nord, selon la tradition constante. Le résultat ne répondit pas à son attente : il n'y avait point d'entrée. Cinquante pieds de sable avaient été en vain enlevés, et l'on aura une idée des difficultés de cette entreprise, quand on saura qu'il n'a pas fallu moins de vingt-deux jours à trois cents ouvriers, pour en venir à bout . Mais si l'entrée ne fut pas trouvée, tant d'efforts ne demeurèrent point sans récompense. Depuis quinze siècles, peut-être, les flancs du Sphinx étaient ensevelis, et il fut possible de reconnaître, pour la première fois, son étrange construction. En effet, le Sphinx est moins l'œuvre des hommes que l'œuvre de la nature. C'est un rocher brut, auquel le hasard avait donné les vagues contours d'un animal accroupi. Les Égyptiens se sont contentés de revêtir ce noyau d'une maçonnerie destinée à combler les cavités, à accentuer les saillies, en un mot, à compléter les formes. Les cavités considérables sont remplies par des grosses pierres assemblées sans art. Mais l'enveloppe extérieure est composée de petites assises très régulières, taillées et sculptées avec le plus grand soin, de manière à modeler jusqu'aux muscles, jusqu'aux moindres détails du monstre. Telle est même la finesse d'exécution, telle est l'importance accordée à la sculpture, que l'architecture proprement dite parait déroger à ses lois les plus simples, aux lois de l'équilibre. Les assises surplombent parfois de manière à compromettre la solidité du travail, ou plutôt, comme la solidité n'y a rien perdu, ce n'est qu'une hardiesse et une beauté de plus.
Cette découverte, importante au point de vue de l'art, l'est doublement pour l'archéologie. Elle permet d'expliquer maintenant quelques passages d'une inscription grecque, trouvée autour du Sphinx par Caviglia. Cette inscription s'adresse au Sphinx, comme s'il était l'œuvre des dieux. Pourquoi l'œuvre des dieux, se demandait-on, lorsque la seule partie apparente et connue attestait le travail des hommes? Nous savons, grâce à M. Mariette , que ce monument est, en effet, un jeu de la nature.


“Les dieux éternels ont formé ton corps merveilleux, dans leur bienveillance pour la contrée qui produit le froment ; ils l'ont dressé au milieu d'un vaste plateau, et ils ont repoussé les sables de ton île rocheuse, etc.” On trouvera au Louvre le texte de cette inscription gravée par Arrien sur huit des pierres qui composaient un des doigts du Sphinx. M. Drovetti les a rapportées en France avec sa célèbre collection.
Après sa première tentative, M. Mariette, assuré qu'il n'y avait point d'entrée sur la face nord, revint à sa première idée, à la conclusion qu'il avait tirée de l'examen des lieux et de l'étude de la stèle de Sérapéum. Il chercha autour du Sphinx une grande construction. Après quelques jours, il trouva un temple de la quatrième dynastie, contemporain des Pyramides, le seul spécimen qui nous reste de l'antique architecture que les Hyksos firent oublier. A l'extérieur, le temple a la forme d'une pyramide tronquée ; les assises sont des pierres gigantesques, décorées d'ornements sculptés sur un fond en retraite ; ces ornements représentent, soit une fleur de papyrus sur sa tige, soit des rectangles superposés à intervalles réguliers. Le tout, d'ailleurs, s'élève à une cinquantaine de pieds au-dessus du sol ancien et ne présente d'autre entrée qu'une petite porte à l'angle nord-ouest. L'intérieur est une série d'appartements spacieux, coupés de galeries et de corridors. L'architecture présente une simplicité toute primitive : des piliers monolithes, hauts quelquefois de quarante pieds, sans base, sans chapiteau ; des architraves, d'une portée considérable, qui reposent sur les piliers. Mais ce qui excita l'étonnement de M. Mariette, ce fut la richesse des matériaux et leur disposition systématique. Tout est granit ou albâtre : quand les parois des appartements sont en granit, les plafonds et les dalles du sol sont en albâtre ; quand au contraire les parois sont en albâtre, les dalles et les plafonds sont en granit. Il ne faut chercher à ce système d'autre motif que le besoin de variété. Du reste, non seulement le granit supporte sans danger cette comparaison avec l'albâtre, mais ses teintes plus riches, parfois d'un rose charmant, son poli, sa fermeté, l'emportent sur le grain inégal de l'albâtre et sur ses taches terreuses.
Le temple est donc vraiment remarquable par sa simplicité pleine de grandeur, par la masse imposante des matériaux, et leur richesse, et surtout par l'antiquité inouïe à laquelle il remonte. Nous n'avons découvert encore en Égypte aucun temple antérieur à la dix-huitième dynastie. Les Pasteurs ont tout détruit et n'ont respecté que les tombeaux. Si ce temple que M. Mariette croit le temple d'Armachis, dieu égyptien dont le Sphinx n'était que la statue gigantesque, si ce temple d'Armachis n'a pas été renversé, il le doit à sa position au milieu de la nécropole, au milieu du désert, où les Hyksos ne paraissent pas avoir étendu leurs dévastations.
Ces fouilles demandèrent beaucoup de temps et d'argent ; le Gouvernement français, qui voulut partager avec le duc de Luynes l'honneur de cette belle entreprise, fournit à M. Mariette les moyens de mener à fin les travaux. Le Sphinx a été étudié complètement, ses alentours déblayés, autant que l'état des lieux et l'amoncellement incroyable des sables ont permis de le faire. Plusieurs questions de topographie sont, en outre, résolues ; mais il appartient à M. Mariette d'exposer lui-même ses idées et les résultats de ses recherches. Je dois, ainsi que je l'ai fait pour le Sérapéum, lui laisser la légitime satisfaction de les soumettre au monde savant.
Ainsi, pendant sa campagne en Égypte, il a été donné à M. Mariette de terminer heureusement deux explorations bien différentes, quoique également vastes et difficiles ; il a pénétré l'énigme du Sphinx, il nous a rendu les tombeaux d'Apis. Dans le désert, il tranchait une question que bien des savants avaient en vain agitée avant lui : à Memphis, il soulevait à son tour un problème plein d'incertitudes mais qu'il allait résoudre victorieusement. Le Sphinx et le Sérapéum. voilà de grands monuments, de grands souvenirs, auxquels il est doublement glorieux d'avoir attaché son nom. Il y a longtemps que la science française s'est emparée de l'Égypte : c'est en représenter dignement les traditions que de pousser plus avant ses conquêtes.”

“Cette énorme Statue (a) fait juger à plusieurs savants que les anciens peuples de ce Royaume avaient le secret de fondre la pierre” (Thomas Corneille - XVIIe s.- à propos du Sphinx)

Cliché de Zangaki
De dix-neuf ans le cadet de son frère Pierre, le célèbre dramaturge auteur du Cid, Thomas Corneille (1625-1709) est l’auteur du Dictionnaire universel géographique et historique contenant la description des royaumes, empires, états, provinces, pays, contrées, déserts, villes, bourgs, abbayes, châteaux, forteresses, mers, rivières, lacs, baies, golfes, détroits, caps, îles, presqu’îles, montagnes, vallées, la situation, l’étendue, les limites, les distances de chaque pays, la religion, les moeurs, les coutumes, le commerce, les cérémonies particulières des peuples et ce que l’Histoire fournit de plus curieux touchant les choses qui s’y sont passées, le tout recueilli des meilleurs livres de voyages et autres qui aient paru jusqu’à présent.
La fin de cet interminable titre annonce la méthode de l’auteur : selon toute vraisemblance, il n’a rien connu personnellement de l’Égypte, mais s’est contenté d’une compilation, avec tous les risques d’approximations ou d’inexactitudes que cela comportait.
Voici comment est décrit le Sphinx :

“Devant chacune des trois pyramides, on voit encore des vestiges de certains bâtiments carrés, qui semblent avoir été autant de temples, et à la fin de celui de la seconde pyramide, il y a un trou, par lequel quelques-uns croient qu'on descendait dans le temple pour aller consulter l'Idole, qui était éloignée de ce trou de quelques pas, et qui avant la venue de Jésus-Christ, rendait réponse de ce qu'on lui demandait, dès que le Soleil était levé.
Les Arabes nomment cette Idole Abou el Haoun, c'est-à-dire, père de Colomne, et Pline l'appelle Sphinx, et dit que ceux du pays prétendent que le Roi Amasis soit enterré en dedans. C'est un demi corps sans bras, comme une manière de terme posé sur une base convenable au vaste Colosse qu'elle soutient. Il représente une femme avec son sein, et est d'une prodigieuse hauteur. La tête a près de cent pieds de tour, et soixante depuis le menton jusqu'au sommet. Le nez est proportionné au reste, et les oreilles sont d'une étendue démesurée. 
Ce buste d'une si monstrueuse grosseur est tout d'une pièce, creux par dedans, et la pierre dont il est fait approche beaucoup de la beauté du marbre. Cette énorme Statue, avec la colonne d'Alexandrie, et les obélisques d'une excessive hauteur qu'on a trouvés dans l'Egypte, ont fait juger à plusieurs savants que les anciens peuples de ce Royaume avaient le secret de fondre la pierre, et d’en pouvoir faire des masses de la grandeur qu'ils voulaient.”

mardi 25 juin 2013

Inventaire, par Josiah Conder, des travaux de désensablement du Sphinx effectués par Caviglia

L’auteur-éditeur britannique Josiah Conder (1789-1855) est surtout connu pour son The Modern Traveller, un ouvrage en trente volumes décrivant la géographie de nombreux pays.
N’ayant jamais voyagé lui-même à l’étranger, il s’y est adonné à un travail de compilation, comme par exemple dans sa description des pyramides égyptiennes, pour laquelle il se réfère à Richardson, Caviglia, Salt, Bruce, etc.
Le texte que j’ai choisi ici est extrait du vol. V., 1830.

Cliché de Francis Frith (1858)

“But by far the most brilliant of Mr. Caviglia's discoveries are those to which he was led in the laborious process of uncovering the great Sphinx in front of the Pyramid of Cephrenes. His first attempt was not satisfactory, owing to the great difficulty of the undertaking. He commenced his operations by digging a very deep trench on the left or northern side, near the shoulder, about twenty feet wide at top, and three only at the base ; but, in spite of all their planking, the wind drove back, at night, more than half of the sand which they had cleared away in the day. By this trench, however, he ascertained that the external surface of the body below is composed of irregularshaped stones, built up with much care, and covered with red paint ; and that the joints mentioned by some authors, are nothing more than veins in the stones.
His second attempt was made in front. Commencing in the early part of March, he continued his operations till the end of June, and, with the assistance of from sixty to a hundred persons a day, he succeeded in laying open the whole figure to its base, and in exposing a clear area extending a hundred feet from its front. (1)
The discoveries to which these operations led, are thus stated (*):
"On the stone platform in front, and centrally between the outstretched paws of the Sphinx, was found a large block of granite, fourteen feet high, seven broad, and two thick. The face of this stone, which fronted the east, was highly embellished with sculpture in bas-relief, the subject representing two sphinxes seated on pedestals, and priests holding out offerings, beneath which was a long inscription in hieroglyphics, most beautifully executed ; and the whole design was covered at top, and protected, as it were, with the sacred globe, the serpent, and the wings.
Two other tablets of calcareous stone, similarly ornamented, were supposed, with that of granite, to have constituted part of a temple, by being placed one on each side of the latter, and at right angles to it. One of them, in fact, was still remaining in its place : of the other, which was thrown down and broken, the fragments are now in the British Museum.
A small lion couchant in front of this edifice, had its eyes directed towards the sphinx. There were besides, several fragments of other lions rudely carved, and the fore part of a sphinx, of tolerable workmanship ; all of which, as well as the tablets, walls, and platform on which the little temple stood, were ornamented with red paint, a colour which would seem to have been here, as in India, appropriated to sacred purposes.
In front of the temple was a granite altar, with one of the four "horns" still retaining its place at the angle. From the effects of fire evident on the stone, this altar, it would seem, had been used for burnt-offerings.
On the side of the paw of the great Sphinx, were cut several indistinct inscriptions in Greek characters, addressed to different deities, one of which appeared to be a mere play upon words ; another, commencing with the usual phrase, tos proskunêma (adoration), ended with the name of Aurora ; and a third contained the word paxôn, one of the Egyptian months. On the second digit of the paw was sculptured, in pretty deep characters, an inscription in verse, of which the following elegant translation has been furnished by Dr. Young, to whom the learned world are indebted for supplying the illegible words in the original.
"Thy form stupendous here the gods have placed,
Sparing each spot of harvest-hearing land,
And with this mighty work of art have graced
A rocky isle, encumbered once with sand,
And near the pyramids have bid thee stand :
Not that fierce Sphinx that Thebes erewhile laid waste,
But great Laetona's servant mild and bland ;
Watching that prince beloved who fills the throne
Of Egypt's plains, and calls the Nile his own.
That heavenly monarch, (who his foe defies,)
Like Vulcan powerful, (and like Pallas wise)."
Arrian.

The signature gives it a more than common interest, which will not be weakened, if it should be decided, that it is to be ascribed to the celebrated historian whom Gibbon has dignified with the epithet of the 'elegant and philosophical Arrian'.
"On the digits of the southern paw were only discovered a few of the usual dedicatory phrases in homage of Harpocrates, Mars, and Hermes. One inscription gives, as Mr. Salt reads it, to the Emperor Claudius, the extraordinary appellation of agathos daymôn, an instance of flattery which can only be outdone by that of another inscription, lately discovered in Upper Egypt, where Caracalla is styled 'piissimus' on the very same stone from which the name of his murdered brother Geta had, probably, been erased by his own orders.
On another small edifice in front of the Sphinx, was an inscription with the name of Septimius Severus, in which the name of Geta was erased, as in the former, and as it also is in the triumphal arch erected by the same emperor at Rome. The former inscription, however, is not to Claudius, but to his successor Nepôn, as may be distinctly traced in the first line through the imperfect erasure." (2)
The edifices on which the inscription appeared, were placed on two elevated platforms, on the outside of the altar, and directly in front of the animal ; as if "intended as stations for the Roman emperors or prefects, to view the solemn rites performed in the temple and at the altar in front ofthe Sphinx".
This singular monument has been, like every thing else in Egypt, the subject of very opposite representations. Dr. Richardson says : "The features are Nubian ; the expression is particularly placid and benign." Denon speaks of it in similar language. The expression of the head, he says, "is mild, benign, and tranquil, the character African ; but the mouth, the lips of which are thick, has a sweetness of expression and a fineness of execution truly admirable : it is flesh and life." The Author of " Scenes and Impressions" confesses that he was disappointed by it. "It has neither the size, nor the majesty, nor the sweetness with which it is usually represented." Mr. Salt states, that, like many other travellers, he felt, at first, that the praises lavished by Norden, Denon, and others, were greatly exaggerated ; but, he adds, “the more I studied it at different hours of the day, and under differents effects of light and shade, the more I became satisfied that they had barely done justice to its real merits". This gentleman had the advantage of contemplating at his leisure this imposing monument, when laid open in front to its very base, with the fragments of its supposed beard resting beneath its chin ; its huge paws stretched out fifty feet in advance from the recumbent body ; with all the appendages of a temple, granite tablet, and altar spread out on the platform before it ; and he admits that these interesting objects, which had for ages been buried deep inthe sand, undoubtedly tended to exalt the main figure in his estimation. For want of these objects by which to judge of the scale of its dimensions, travellers would be very liable to underrate at least the magnitude of the figure ; nor should it be forgotten, that it was intended to be looked up to from its base.
The Arabs call the Sphinx Abou-el-hol, the father of terrors, or Abou-el-haoun, the father of the column ; in allusion, possibly, to the stone tablet between its paws. (3)
Herodotus makes no mention of this enigmatical figure ; yet, from the great disintegration that it has suffered, Dr. Richardson supposes that it can hardly be less ancient than his time. Pliny, the first author who mentions it, merely states its position to be in front of the pyramids, adding, that the natives called it the tomb of King Amasis, and said that it was brought there ; which, he remarks, could not be true, as it is cut out of the rock ; but he offers no opinion as to its design or origin.
The sphinx, in the Greek mythology, is generally represented with the countenance of a beautiful female and the body of a lion. The head of this sphinx, however, is now supposed to be that of a man ; the beard found between its paws being considered as decisive on this subject.
"The expression of almost all the Egyptian figures, remarks Dr. Richardson, is so particularly mild and interesting that, without the accession of the beard, they might all pass for females. This figure was entire in the time of Abdallatif, who describes its graceful appearance, and the admirable proportion in the different features of its countenance, of which he particularly mentions the nose, the eyes, and the ears ; adding, that they excited his astonishment above very thing that he had seen in Egypt."
But is it certain that what is styled the beard, is really intended for such an appendage ? We must confess that there appears to us strong reason to question the accuracy of the statement ; and the inscription seems at direct variance with such a supposition. The Theban monster was certainly not an "androsphinx" ; nor can we bring ourselves to believe that Latona's chaste attendant was of a different sex. There can be no doubt, we think, that the figure is allegorical ; and it seems clear from the inscription, that it was connected with the worship of the sun. (4) If so, it might be supposed to be an astronomical symbol,  the sun passing out of Leo into Virgo, during which time the Nile continues to rise.”

(1) Of the immense difficulties which Capt. Caviglia had to encounter, some idea may be formed from the statement, that the slightest breeze or concussion was sufficient to set in motion the loose particles of sand, and to occasion the sloping sides of the mass to crumble down, forming a cascade of sand. On the southern side of the paw, the whole body of Arabs were employed for seven days without making any sensible advance, the sand rolling down in one continual torrent. When Dr. Richardson visited the Pyramids in October of the same year, "the Arabs and the wind had replaced the greater part of the covering, and the lower extremities oi the Sphinx were as invisible as before".
(2) This stone is now in the British Museum. The inscription, with a translation, is given in the paper from which this account is taken, Quart. Rev. vol. xix. p. 414. It purports to have been erected, by the inhabitants of Busiris in the Letopolitan district, near the Pyramids, to the Emperor Nero. Another inscription, found near the same spot, is dated in the reign of Antoninus Pius and his son Verus.
(3) Dr. Richardson states that " both on the temples and on the tombs, the Sphinx is frequently represented with a pyramid or an obelisk between its paws."
(4) In the dedicatory inscription to the Emperor Nero, that monarch is stated to have been present at the "lawful rites" celebrated here, and to have worshipped the sun, "the overseer and saviour of the world".
Source : Google livres

(*) par le consul-général britannique au Caire Henry Salt