lundi 24 juin 2013

“Il y a de la grâce, il y a de la beauté dans ce fragment de montagne taillé en figure humaine” (Charles Edmond Chojecki - XIXe s.-, à propos du Sphinx)

Pavillon égyptien lors de l'Exposition universelle de 1867
Extrait du texte de présentation du Pavillon égyptien lors de l'Exposition universelle de 1867 à Paris, par le commissaire général de "l'Exposition vice-royale d'Égypte" : Charles Edmond Chojecki (1822- 1899), écrivain et journaliste polonais.

“Le sphinx repose aussi sur le roc, mais tout autour l'eau du Nil le baigne et le caresse. On avait amené le Nil à ses pieds. L'eau tout de suite fait penser à la vie. On l'a donc voulu, lui, l'emblème de la vie, accroupi dans les mille bruits de l'eau, comme on a voulu la pyramide assise au seuil du désert et de son silence funèbre. Et il n'est pas une figure faite de lignes géométriques, élémentaires, abstraites, mortes ; il est une figure de lion à tête d'homme : une âme humaine dans un corps de lion, le courage intrépide et sûr du lion au service d'un homme.
La pyramide encore est une montagne artificielle, apportée sur place de main d'homme, pierre à pierre ; au contraire, le sphinx est une montagne naturelle, dans laquelle on a déblayé, fouillé ses formes colossales. Il a quatre-vingt-dix pieds de long, soixante-quatorze de haut, et, du menton au sommet de la tête, vingt-six pieds.
Comme elle est attentive, cette tête ! comme elle écoute ! comme elle regarde ! Quelle expression de vie ! Elle regarde l'orient, de ses deux yeux profonds, énormes, fixes. Son sourire est gracieux, et tout son visage est plein d'une grande sérénité, d'une grande douceur.

L'ensemble est monstrueux ? Non, mais singulièrement majestueux. Il y a de la grâce, il y a de la beauté dans ce fragment de montagne taillé en figure humaine. Les artistes qui en ont sculpté la masse avaient le souffle assez puissant pour l'animer tout entière. Comme la pyramide elle-même, le sphinx, en vérité, n'est pas trop grand pour l'idée qu'il exprime : l'Égypte vivante, accroupie sur le Nil, gracieuse, souriante, épanouie, heureuse, une oasis dans les sables ; la vie à côté de la mort !”

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